Lors d'une discussion relative au choix des oeuvres présentées dans sa récente exposition au MAMCO à Genève, Fabrice Gygi raconte comment, pris dans un embouteillage sur une autoroute, il avait été émerveillé par la beauté des camions -et notamment la manufacture soignée des bâches et des sangles. Il s'en est aussitôt inspiré pour réaliser lui-même les "Colonnes" en bâche blanche (1993), puis d'autres sculptures en bâche cousue. Depuis, ces matériaux sont entrés dans son vocabulaire sculptural. L'interrelation des "peaux" établie : la peau de l'homme, la peau protection
(choisie), la peau prison (imposée). Pour le visiteur qui découvre les oeuvres de Fabrice Gygi, le choix précis des matériaux et le soin des détails saute aux yeux. Il est pris par la même envie de toucher, de caresser chaque élément, comme l'on est tenté de toucher une carrosserie bien galbée, ou une peau lisse. Tout en se rendant compte que ces objets ambivalents traduisent une sensibilité à fleur de peau, une lucidité et une violence en constant éveil.  

Pour sa quatrième exposition personnelle à la galerie, Fabrice Gygi présente quatre nouvelles sculptures au rez-de-chaussée, ainsi que des nouvelles séries de linogravures.  
CAILLEBOTIS, 2004, Aluminium peint, bois. Cette sculpture à géométrie variable décline la tension structurelle entre le cadre rigide en acier de la grille - ou caillebotis - et la mobilité, la flexibilité des barres de bois. Barricade en sommeil, ou jeu d'adresse démesuré pour enfants.  

PYLÔNES, 2004, Acier peint, béton. Trois pylônes élancés, éléments en croissance dans le paysage urbain. Présences porteuses et protectrices ou insolemment agressives, selon notre rapport avec elles.  

Y,  2004, Cuir, crin végétal, inox. Trois figures en cuir cousu, sanglées pour être suspendues ou attachées. Formes court-circuitées, allégoriques, présentes dès les premières civilisations pour signifier le masculin/féminin. Mais aussi punching-ball re-dessinés pour des fonctions encore à définir.

TORAX, 2004, inox, palan, rail métallique. Une pince à cheveux géante suspendue à une poulie coulissante le long d'une poutre, à moins que ce soit une carcasse ? Ou encore les bras d'une grue, prête à déblayer après un quelconque désastre.  
Les linogravures occupent une place constante et parallèle dans l’activité créatrice de Fabrice Gygi. Tirées à peu d'exemplaires (6 maximum), il les préfère aux dessins sur papier, à cause de l'entaille très douce et la constance du trait -à la manière des tatouages. Les sujets -toujours tendres quoique quelquefois ironiques, révèlent l'artiste dans ses pensées plus intimes. Des haïkus dessinés.  

Les prochaines expositions personnelles de Fabrice Gygi: - du 20 février au 17 avril 2005 à la Villa Merkel, Esslingen (D) - été 2005 (dates à définir), Orange County Museum, Californie (US) - du 3 septembre au 20 novembre 2005 au Kunstmuseum, St-Gallen (CH) Un catalogue est en préparation avec les éditions JRP/Ringier (versions française, anglaise, allemande).

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