Pour « Avant l’orage », Danh Vo est invité à investir l’espace emblématique de la Rotonde de la Bourse de Commerce et propose une installation inédite.

Tropeaolum de Danh Vo s’enracine dans cette serre de métal, de béton et de pierre et crée un territoire mutant, où s’entremêlent les récits. Les troncs et branches d’arbres foudroyés et victimes des intempéries, issues des forêts françaises, sont soutenues par des étais de bois, provenant des forêts durables de Craig McNamara. Ce dernier n’est autre que le fils de Robert, ancien Secrétaire d’Etat et architecte de la guerre du Vietnam, responsable indirect de l’exil de la famille de l’artiste, ayant fui les conséquences d’un conflit qui les a conduits s’installer au Danemark. 

L’œuvre puise également ses racines dans la vie que Danh Vo mène, depuis 2017, dans son atelier-ferme à Güldenhof, près de Berlin. L’artiste a été transformé par cette nouvelle relation à la «nature», au jardin, à la Terre. Fleurs, champignons, mousses, arbres, interactions végétales, sont devenus des éléments très présents dans son travail. Tropeaolum en tire une temporalité particulière, rien n’y meurt jamais vraiment, les possibilités de survivance et de mutation demeurent. D’autres œuvres de l’artiste, issues de la collection, trouvent refuge en ce jardin sombre et dialoguent avec d’anciennes sculpture en bois collectées par l’artiste. Les fantômes de l’histoire comme les vestiges de la culture, s’hybrident pour donner corps à une renaissance végétale. Dans une relation étroite et sensible à la Rotonde et sous la toile marouflée qui orne la base de la coupole, cette proposition réagit avec une représentation qui agence, à travers le pinceau de peintres de la fin du 19e siècle, le monde selon une perspective coloniale et expansionniste, Danh Vo agence des objets et des artefacts dont il explore la charge symbolique et émotionnelle, le pouvoir d’évocation et de réparation.

La pratique de Danh Vo est faite d’un recours aux fragments, au prélèvement, à la lacune, la relique, l’assemblage. Elle se nourrit d’une collecte d’objets et d’images que l’artiste réactive par un geste, une situation nouvelle. En entremêlant sa trajectoire intime et des récits personnels avec des enjeux géopolitiques, sociaux et historiques plus vastes, il questionne les processus de construction des identités, des héritages et des valeurs transmises. Pour l’artiste - de nationalité vietnamienne et danoise, enfant de boat people émigré dans ce pays scandinave – : l’histoire concerne le présent et façonne l’avenir. «Ne pas “commencer dans la limite du cadre”, comme un art de musée, un art d’exposition, un “art qui sent l’art”. Venir du dessus ou du dessous, traverser le cadre, l’articuler à tout ce qui lui échappe, ça peut être une exposition», écrivait Patricia Falguières, en 2015, à l’occasion de l’exposition imaginée par Danh Vo pour la Punta della Dogana, à Venise (Slip of the tongue). 

Danh Vo (né en 1975) appréhende le monde en archiviste. Ses installations, croisant histoire personnelle et mémoire collective, explorent les processus de construction des identités, des héritages et des valeurs culturelles. De son départ du Vietnam à quatre ans pour le Danemark à son orientation sexuelle, les expériences personnelles et familiales de Danh Vo constituent les principales ressources de sa création artistique. À travers un collectionnisme rigoureux, il rassemble photographies, souvenirs, fragments, objets et témoignages de sa vie personnelle. En résultent des installations où chaque objet prend sens, questionnant nos représentations de l’identité et de l’histoire. Danh Vo est diplômé de la Royal Danish Academy of Fine Arts et de la Städelschule de Francfort. Plusieurs expositions d’envergure internationale ont été consacrées à son travail. Artiste dont certaines œuvres sont conservées au sein de la Collection Pinault, Danh Vo a également été le co-commissaire, avec Caroline Bourgeois, de l’exposition «Slip of the Tongue» à Punta della Dogana (2015-2016).

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