Au cours des deux dernières années, Wade Guyton a créé une nouvelle série de peintures qui seront pour la première fois exposées au Musée Brandhorst dans toute leur diversité et leur complexité. Alors que les symboles minimalistes tels que les lettres X et U, les rayures et les surfaces monochromes étaient les éléments marquants de ses œuvres précédentes, les nouvelles toiles de Guyton surprennent par un éventail de motifs et de techniques diverses : instantanés de téléphone portable de son studio new-yorkais, captures d'écran de l'édition en ligne du New York Times, ainsi que des formulaires abstraits. Ces derniers sont en fait des agrandissements extrêmes de fichiers bitmap, offrant un examen plus approfondi de « l’anatomie » du langage visuel numérique. L'exposition au Musée Brandhorst présente 35 peintures sur toile, deux projections vidéo ainsi qu'une série de dessins intitulée Zeichnungen von Drama und Frühstück im Atelier. Pour les 120 dessins de cette œuvre, Guyton a imprimé numériquement sur des pages arrachées de catalogues d'art. Ils sont exposés dans 14 vitrines recouvertes de carreaux de composition en vinyle.

Depuis le début des années 2000, Guyton poursuit, avec une constance impressionnante, une enquête sur les conditions et l'impact de la production d'images numériques. Sa pratique artistique suit un processus apparemment simple : le linge et les pages des catalogues d'art sont alimentés par une imprimante à jet d'encre. Au fil des années, un « style de signature » a émergé, consistant en un ensemble de signes et de motifs que Guyton entre dans des programmes tels que Photoshop ou Word pour ensuite les imprimer sur diverses formes de support. À travers des chevauchements imprévus, des erreurs mécaniques et des divergences qui révèlent la contingence de la technologie numérique, son art rend le code numérique visible et le laisse « parler ». L'artiste abuse délibérément de son imprimante en la défiant avec des commandes et des matériaux qui dépassent ses spécifications de conception. En conséquence, l’œuvre numérique renverse ses conflits inhérents, suscitant une discussion sur la nature conditionnelle de sa visualisation.

Dans sa nouvelle série, Guyton va encore plus loin en intensifiant l'interaction entre la peinture et la photographie, les modes de représentation analogiques et numériques qui ont toujours été présents dans son travail. En intégrant les formats désormais omniprésents de l'instantané de téléphone portable, de la capture d'écran et du zoom, Guyton élargit son langage visuel à la fois vers l'extérieur et vers l'intérieur. Son art suit l'expansion rapide et la diversification du code numérique dans tous les domaines de la vie : enregistrer, par exemple, le clic sur les informations, le regard par la fenêtre du studio, la pause café dans la cuisine et le sol sur lequel l'artiste se tient debout tandis que la toile sort progressivement de l'imprimante et se borde, pouce par pouce, sur les planches du plancher.

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